Qu’ils aillent au diable!

“S’ils ne sauvent pas la Grèce, qu’ils aillent au diable…” C’est l’ancien chancelier allemand social-démocrate, Helmut Schmidt, qui le dit. Et il n’est pas seul à le penser. Si les dirigeants européens sont incapables de trouver une solution à la crise grecque, de trouver une issue fondée sur la solidarité et la discipline collective, alors, ils ne méritent pas l’Europe. Ou plutôt l’Europe, la vraie, celle des peuples, celle de nos enthousiasmes, celle de la liberté de circulation, de la monnaie unique, de nos étudiants qui découvrent Erasmus, du mélange des cultures, méritait d’autres dirigeants. Si c’est le diktat de Madame Lagarde qui détermine l’avenir de la monnaie unique, alors qu’on cesse de nous parler du poids de l’Europe dans le monde, si c’est le Fonds Monétaire International qui décide du devenir des peuples européens, alors rangeons vite toutes nos illusions continentales et coulons nous dans le moule confectionné à Washington.

L’heure est grave! C’est un demi-siècle d’espérance, des décennies d’efforts acharnés pour construire sur les ruines d’une guerre abominable un projet commun, que l’on s’apprête à rayer d’un trait de stylo. Pourquoi? D’abord parce que la directrice du FMI et quelques autres grands responsables de la finance internationale, n’auront pas réussi à obtenir de la Grèce qu’elle diminue encore le niveau de ses retraites. Parce que le nouveau gouvernement grec recherchait une issue autre que l’humiliation. Mais que l’humiliation était obligatoire. Pour que plus personne n’ose plus jamais contester les dogmes forgés dans les entrailles des grandes banques et des organismes financiers qui savent toujours ce qu’il faut faire pour le bienfait des économies et donc des peuples, mais dont les pronostics sont démentis par les faits un à un depuis des années.

Ce sont les mêmes qui n’avaient pas vu venir la crise financière de 2008, qui au contraire s’enthousiasmaient devant un système financier en folie. Les mêmes qui ont dû finir par reconnaître qu’ils avaient fait plus de mal que de  bien à la Grèce en lui imposant une austérité insoutenable. Les mêmes encore qui prédisent aujourd’hui que l’Europe n’a pas à craindre un “Grexit”, une sortie de la Grèce de l’euro, et qui voudront demain nous dicter les mesures à prendre pour surmonter la crise dans laquelle ils auront plongé le continent.

Leurs modèles mathématiques financiers peuvent bien dire ce qu’ils veulent. Ce qui se joue autour de la question grecque les dépasse. C’est bel et bien la survie de l’Europe, comme ambition, comme projet commun, comme espérance pour la jeunesse du continent qui se joue aujourd’hui. C’est une page de l’histoire de l’Europe qui sera tournée si nos dirigeants ne se ressaisissent pas, sans que l’on sache bien qui pourra écrire la suivante. Si les Merkel, Hollande et consorts continuent plus longtemps à faire comme si c’était le FMI, la BCE et les marchés financiers qui font l’Europe. A refuser de voir que c’est d’eux mêmes que dépend l’avenir du continent. Qu’après les De Gaulle, Adenauer, Giscard, Schmidt, Mitterrand ou Kohl, c’est à eux aujourd’hui, François Hollande et Angela Merkel, qu’il incombe de décider du devenir du continent. De s’élever au niveau de l’Histoire, la grande, pas celle des déficits budgétaires, et des taux de TVA.

S’ils ne sont pas capables aujourd’hui de mettre de l’ordre dans la maison, d’en chasser les marchands, pour reprendre le pouvoir et le rendre cinq minutes aux peuples qui les ont désignés. Si prouver que l’Europe est autre chose qu’un grand marché les dépasse. S’ils n’ont pas le courage de reprendre les choses en main et d’imposer aux grecs comme aux organismes financiers, non pas telle ou telle mesure d’austérité, mais ce grand dessein que le continent cherche à s’inventer depuis le lendemain de la guerre… Alors, qu’ils aillent au diable!

 

12 réflexions sur « Qu’ils aillent au diable! »

  1. Paroles just et encourageants.

    Il faut recuperer le project europeenne avant qu’il soit trop tard.

    Faiçons confiance.

    Eppure si muove

  2. Devant l’inqualifiable agression de la Russie , qu’ils aillent au diable de toutes façons ,je ne suis pas et ne serai JAMAIS europeen !

  3. Bonjour Michel,
    Helmut Schmidt a surement raison, mais que fait-on dans la réalité?

    Le postulat de Syriza était d’imposer ses options aux autres européens forts d’un certain nombre d’arguments (sa souveraineté, son élection démocratique, la souffrance des grecs). D’un autre côté, certains citoyens, par exemple en Finlande ou en Allemagne, disent tout aussi démocratiquement qu’ils ne paieront pas pour le Grèce. De quel droit la démocratie grecque serait plus valable que la démocratie finlandaise?

    De plus, qu’une explosion de la dette publique dans un pays de la zone Euro se propagerait aux autres .. par démagogie.

    En fait, la Grèce a fait le plus dur, en rétablissant un budget apparemment en excès primaire. Il suffit maintenant qu’ils fassent rentrer les recettes fiscales des riches grecs, notamment en limitant les privilèges des armateurs et de l’Eglise. (ce que Syriza refuse de faire, du fait de son alliance avec un parti de droite ultra-nationaliste!). Que doit faire l’Europe et les europhiles? Aider la Grèce à lutter contre la fraude fiscale, dans l’UE et aussi en Suisse. Envoyer des experts fiscaux héllenistes? (on a cela au SPD ou au PS?).

    Quand au FMI, c’est vrai on peut s’en passer. Le service que peut rendre Christiane Lagarde c’est de convaincre la Suisse d’abandonner le secret bancaire pour les citoyens grecs!

    Enfin, Goldman Sachs mérite une amende de quelques Mds d’Euros. Les autorités US ont imposé des amendes au CL ou à la BNP pour bien moins que cela. Il est temps que Goldman Sachs paye.

  4. Qu’a fait l’Argentine lors de sa dernière grave crise financière ? Refuser de payer ses dettes. Et l’Islande ? Elle a dit merde au FMI; Pourquoi les banques ont-elles accepté d’accorder des prêts à une Grèce déjà en faillite et qui mentait, ce que tout le monde savait, sur la santé de son économie ? Pourquoi la suisse accepte-t-elle les fonds déposés par les grecs les plus riches qui ne payent pas d’impôts à leur pays ? Pourquoi les fabricants d’armes, dont la France et l’Allemagne, ont-ils continué à vendre des armes à une armée pléthorique dont ils critiquent maintenant le coût faramineux ? Pourquoi n’entend-on pas dans les médias officiels toutes ces questions pleines de bon sens ? C’est parce que les critiqueurs se sont bien sucrés au passage !

  5. Tant que “tous les états membres” ne voteront pas une loi (obligatoire dans tous les états) que la corruption fiscale ….. c’est fini et très vivement réprimée, nous n’arriverons à rien. Il faut en finir avec ces quartels financiers. Si les gouvernements européens n’imposent pas les lois suffisantes (malheureusement certains de leurs membres sont pourris jusqu’à l’os, Le peuple “européen de basse classe ou moyenne” ne fera, comme toujours : payer et de plus en plus pour remplir les caisses de quelques-uns.

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