Un engrenage mortifère!

Le problème de la surenchère, c’est qu’on ne peut jamais savoir où elle s’arrêtera. Et donc qui, finalement, paiera combien. Entre CGT-gauchedelagauche et gouvernement, on en est là. Il faudra bien que l’un ou l’autre lâche, et en fasse les frais.

Après avoir tenté, en vain, de paralyser la France, les cégétistes, FOistes, et leurs alliés -extrême-gauche, verts tendance Duflot, et frondeurs pour l’essentiel- ont décidé de poursuivre le bras de fer dans la rue. On en est à une manif par semaine… bientôt une tous les deux jours? Ca sert à quoi? A dire à nouveau leur opposition au projet gouvernemental, sans grande chance d’obtenir un retrait de la loi, mais faute de convaincre, on peut toujours rabâcher. Cela sert surtout à montrer qu’on ne recule pas. Car reculer maintenant, voire négocier une sortie de crise avec le pouvoir, après être allé si loin, se traduirait probablement par un échec cuisant pour la CGT aux prochaines élections professionnelles, qui restent une préoccupation principale.

Pour les petits groupes de casseurs qui de toutes façons sont contre tout, ou à peu près, la nouvelle manif, c’est une nouvelle occasion de “se faire” quelques vitrines et abri-bus, en criant sa haine de la police sous une pluie de grenades lacrymogènes, en attendant la bavure grave qui permettra de rebondir vers de nouvelles mobilisations. Rien de nouveau de ce point de vue, depuis mai 68, stratégie et tactique sont les mêmes ou à peu près. On casse tout ce qui passe à portée, sans se poser de questions, et l’on dénonce la violence de l’Etat policier.

En face, le gouvernement n’est pas beaucoup plus avancé. Certes, il peut faire adopter son texte en utilisant l’article 49-3, pour peu que droite et frondeurs ne mêlent pas leurs votes dans une motion de censure partagée, qui renverrait probablement une bonne partie des députés socialistes dans leurs foyers, et propulserait le chef de l’opposition à Matignon. Nous n’en sommes pas là. Mais on constate que jour après jour la voie choisie par l’exécutif ressemble à une impasse.

Faire marche arrière reviendrait à faire aveu d’impuissance, d’incapacité à réformer. L’obstination mise sur ce dossier depuis le début en paraitrait d’autant plus coupable, qu’elle conduirait finalement à un abandon en rase campagne. En outre, renoncer maintenant à cette réforme serait infliger un camouflet au patron de la CFDT qui a pris le risque de soutenir le projet, et le paierait sans doute très très cher dans les urnes professionnelles. Il faudrait du coup renoncer pour longtemps au soutien réformateur de son syndicat, et bien sûr pour le gouvernement socialiste toute capacité de réforme serait réduite à néant à moins d’un an de la fin du mandat présidentiel. Cette faillite légitimerait le jusqu’au-boutisme du nouveau patron de la CGT prêt à tout pour empêcher qu’on touche une seule virgule du code du travail, et en particulier tout ce qui touche aux prérogatives du syndicat majoritaire. Elle conforterait les frondeurs au sein du parti socialiste dans leur refus de ce qu’ils qualifient de virage néo-libéral, et qui n’est que réalisme politique, et compromettrait par là-même, pour plusieurs années, un retour au pouvoir de la gauche de gouvernement après une défaite plus que prévisible aux prochaines élections.

Alors, pris dans la nasse, le gouvernement a la tentation de la surenchère. Tant qu’à couler, coulons debout, droit dans nos bottes! Et l’on menace d’interdire des manifestations syndicales pour la première fois depuis la guerre d’Algérie.

Absurde, bien sûr! Casser le thermomètre n’a jamais fait retomber la fièvre, et le gouvernement, déjà en grave perte de crédit dans son électorat, n’a pas besoin en plus d’entacher son passage au pouvoir d’une mesure qui constituerait un indéniable recul démocratique.

 

 

 

 

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