Auto-destruction collective

Il n’y aura donc pas de plan J comme Juppé. L’ex premier ministre a jeté l’éponge. En ayant des mots très durs pour François Fillon, qui, c’est vrai, ne s’était pas privé de rappeler la veille devant les caméras de France 2 que le maire de Bordeaux n’avait pas la légitimité suffisante pour réunifier la droite. Juppé en a effectivement pris date et a définitivement jeté l’éponge. Une position qui semble tout aussi définitive que celle qu’il avait adopté il y a quelques semaines en promettant qu’il ne serait jamais un plan B.

“Non c’est non!” disait-il alors pour convaincre du caractère déjà irrévocable de son choix… Sauf qu’entre temps il a remis un jeton dans la machine à plan B des Républicains. En faisant dire à son entourage qu’il était “maintenant prêt à y aller”, il y a quelques jours, Juppé a redonné un fol espoir à ses amis Les Républicains en quête d’une solution pour se débarrasser du forcené de la Sarthe. Et l’on peut parier qu’une partie de ceux qui ont lâché Fillon ces derniers jours l’ont fait pour se préparer à rejoindre le nouveau candidat Juppé. C’est évidemment le cas des centristes de l’UDI dont le président Lagarde citait le nom de Juppé dans l’annonce de son retrait de la campagne de Fillon.

Certes le choix final fait par Alain Juppé est respectable, certainement appuyé sur les meilleures des raisons éthiques. Sa lucidité lorsqu’il reconnaît “ne pas incarner le renouveau”, ni ne répondre “pleinement à l’exigence d’exemplarité”, inspire le respect. Mais on doit admettre que ses amis de la droite et du centre pourraient lui reprocher son indécision, les tergiversations affichées par son entourage, qui n’ont fait que compliquer un peu plus l’affaire.

Car maintenant que les responsables républicains et centristes ont “fui le navire” comme le leur reprochait leur candidat officiel, il va devenir très compliqué de faire à nouveau embarcation commune… La réunification de la droite, nécessaire pour qu’elle puisse se mettre en ordre de bataille avant l’échéance d’avril, est plus qu’hypothétique. Et ce n’est évidemment pas l’unanimité de façade du comité politique des Républicains “renouvelant son soutien à l’unanimité” à François Fillon après avoir tenté depuis des jours de lui trouver un remplaçant qui donnera le change: les électeurs du parti de droite doivent avoir le sentiment qu’on les prend pour des benêts!

C’est que François Fillon est de plus en plus difficile à déboulonner. Il est d’autant plus habilité à répéter qu’il n’y a pas d’alternative à sa candidature, que le seul qui paraissait en mesure de gagner la présidentielle à sa place n’est plus dans la course. S’effacer devant Juppé n’était pas simple, ni légitime pour lui, on l’a vu, et entendu. Alors on ne l’imagine pas céder la place à un second couteau, qu’il s’agisse de Baroin, ou d’un autre. Même si Baroin s’st donné le mal de poser aux côtés de Fillon au Trocadero pour ne pas hypothéquer ses chances. Sauf nouveau coup de théâtre, la droite est probablement condamnée à assister à l’échec de Fillon, alors même qu’elle semblait depuis des mois hyper-favorite de l’élection.

La faute d’abord à Fillon sans doute. Mais pas seulement. Nicolas Sarkozy, qui faisait semblant hier encore de croire qu’il pourrait tirer un compromis d’une rencontre avec Fillon et Juppé, s’y prend un peu tard. C’est lorsque l’alternative Juppé tenait la route qu’il aurait fallu s’en occuper. Mais l’ex-président n’avait probablement pas envie de remettre Juppé en selle. Et puis, il n’était peut être pas si fortement contrarié par le spectacle pathétique donné par son ancien premier-ministre en proie à la justice. Cet ex-“collaborateur” qui s’était permis de l’humilier publiquement, avant de le battre à plate couture à la primaire. Et de fait les proches de Sarkozy n’avaient pas été les derniers à savonner la planche à Fillon, lorsque l’affaire a éclaté, au point que Fillon doive se rendre à la table de Sarkozy pour lui demander de calmer ses troupes.

Bref, il y a un seul point sur lequel les Républicains auront montré leur esprit d’équipe, c’est pour marquer ensemble contre leur camp. Au final, c’est une démonstration de sabordage collectif que vient de donner la droite. Chacun à sa façon a apporté sa pierre à la destruction de l’édifice. Un peu comme, de façon symétrique, le parti socialiste est en train de s’autodétruire, en reniant sa propre action au gouvernement pendant cinq ans, pour donner tout le pouvoir à ceux qui avaient choisi d’entraver la politique du président Hollande et de son premier ministre Valls, écartés successivement de la compétition.

On pourrait appeler ça la malédiction des primaires à 1 ou 2 balles!

1 réflexion sur « Auto-destruction collective »

  1. la palme revient sans doute à Georges Fenech dont le journaliste de C’est à vous à compilé les réactions depuis le début de l’affaire.

    http://www.france5.fr/emissions/c-a-vous/diffusions/07-03-2017_557847

    M Fénech étant régulièrement présenté comme un des fidèles de Sarkozy, on pourrait aussi penser qu’il est chargé de tester les hypothèses pour le patron, en tout cas, cela ne donne pas une haute idée de la politique et de ceux qui la font, ce qui n’est vraiment pas bon pour la démocratie.

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