L’escalade ou le chaos?

Donc l’Allemagne, après avoir longuement tergiversé, livrera à l’Ukraine ses chars lourds Léopard et autorisera ses clients, principalement la Pologne, à en faire autant. Les Etats-Unis devraient annoncer cette semaine, selon le Wall Street Journal, l’envoi de chars Abrams. Le président Macron n’a pas exclu de livrer de son côté des chars Leclerc. Rien ne prouve que la présence de ces chars lourds sera décisive dans le conflit. C’est en tout cas un virage important. Ces chars sont des armes offensives, et leur livraison à l’Ukraine correspond évidemment à un engagement supplémentaire des occidentaux dans le conflit. Ce que tous les porte-parole officiels et officieux de Vladimir Poutine se sont empressés de souligner. Marine Le Pen, par exemple y est formellement opposée, mais elle n’est pas la seule à craindre une escalade que nous ne maitriserions pas.

C’est une évidence, le risque d’escalade existe. Avec l’appui des chars lourds qu’on lui promet maintenant, Volodymyr Zelensky pourrait se retrouver en capacité de gagner la guerre, et donc Vladimir Poutine plus que jamais en position de la perdre. Peut-on imaginer que les Russes perdent la guerre, et se retirent du territoire ukrainien, sans que Vladimir Poutine dans sa folie criminelle ne déclenche un conflit planétaire?

Depuis le début du conflit la question est posée aux occidentaux: comment aider l’Ukraine sans déclencher indirectement une troisième guerre mondiale qui serait forcément nucléaire? Leur réponse jusqu’ici est graduée. Avec une ligne intangible: on aide les ukrainiens qui sont victime d’une tentative d’anéantissement par la Russie, sans se mettre en situation de belligérants, c’est à dire sans faire la guerre ouvertement à la Russie. Au début du conflit, les différentes chancelleries semblaient même disposées à rejouer les accords de Munich de 1938, en cédant une partie du territoire ukrainien à la Russie pour éviter que le conflit s’élargisse. Depuis, chacun a vu la résistance ukrainienne à l’œuvre, sa capacité à s’opposer aux visées de Poutine, la volonté du peuple ukrainien à défendre son pays… Et la doctrine a commencé à évoluer.

Aujourd’hui la question n’est plus celle de la recherche d’un compromis susceptible de calmer, au moins temporairement les volontés impérialistes de Poutine, l’enjeu est bel et bien celui de la défaite de la Russie, et du sauvetage de l’ordre mondial.

Imaginons un instant que Poutine l’emporte totalement, ou continue des mois durant à anéantir le peuple ukrainien en bombardant sans cesse les civils, ou simplement obtienne le rattachement d’une partie de l’Ukraine à la Russie… Ce serait la fin de l’ordre mondial hérité de la deuxième guerre mondiale. La communauté internationale en serait réduite à entériner le droit d’un peuple à anéantir et/ou annexer son voisin sous prétexte que certains de ses habitants parlent la même langue (c’était déjà l’argument d’Hitler lorsqu’il s’emparait des Sudètes) pour peu que le bourreau dispose de l’arme atomique. La dissuasion nucléaire, qui devait interdire à chacun de s’écarter des règles internationales par crainte de la capacité de destruction des autres, ne servirait plus qu’à dissuader la communauté internationale de faire respecter l’ordre mondial, par crainte d’un conflit nucléaire. Cette même crainte qui nous amènerait évidemment à abandonner Taiwan si le dictateur de Pékin décidait de s’en emparer ou de le rayer de la carte, et permettrait au tyran de Moscou de poursuivre son entreprise d’anéantissement sur les pays voisins dont il s’estime l’héritier.

La Russie doit donc perdre cette guerre! Cela ne résoudra pas tout, car il faudra ensuite reconstruire un nouvel ordre mondial, une nouvelle légalité internationale, dans laquelle cette même Russie devra évidemment retrouver sa place. On a vu depuis le début du conflit à quel point les alliances militaires et institutions internationales sont caduques. Surtout, sa défaite ne sera pas sans risque. Chaque pas pour renforcer la capacité militaire de l’Ukraine, aussi mesuré soit-il, nous met à la portée d’un coup de folie de plus de Poutine. Chaque char, chaque batterie de missiles, tout en rapprochant une issue du conflit, rendent la situation encore plus incertaine. Mais il n’y a plus de choix! Capituler devant les visées impérialistes de Vladimir Poutine n’en est pas un!

On ne reconstruira pas un ordre mondial en commençant par valider l’anéantissement d’un peuple, la déportation de milliers d’enfants, l’annexion tout ou partie d’un pays libre! Eviter l’humiliation de la Russie, comme l’a souhaité Emmanuel Macron, ne pourra pas passer par la validation par tous d’un crime contre l’humanité! Quel que soit le risque -et il est incommensurable- la communauté internationale doit préserver ce qu’il reste de légalité internationale. C’est une question de civilisation.

Ukraine: sur la corde raide

Au moins les choses sont claires, si certains avaient encore douté. Dans son discours Poutine a confirmé tout ce que l’on avait deviné. Sa haine viscérale de l’occident, son opposition aux valeurs qui cimentent tant bien que mal l’Europe, son mépris pour le peuple ukrainien, sa volonté de réviser l’Histoire, sa paranoïa aiguë, jusqu’à son homophobie…

L’Europe se retrouve donc dans une situation comparable à ce qu’elle a connu au lendemain de l’annexion des Sudètes par Hitler. Il s’agissait pour le tyran de l’époque de “libérer” les germanophones de l’oppression Tchécoslovaque. Comme aujourd’hui on prétend “libérer” les russophones de l’oppression ukrainienne. Dans les deux cas, c’est un soi-disant respect de l’autodétermination des peuples qui justifiait l’annexion d’une partie d’un état souverain. Dans les deux cas, le tyran s’appuyait sur des extrémistes locaux nourrissant son dessein, et misait sur la faiblesse des dirigeants des autres puissances. Les dirigeants européens actuels n’ont qu’un avantage par rapport à leurs prédécesseurs, c’est qu’ils connaissent la suite de l’histoire. Edouard Daladier et Néville Chamberlain pouvaient au moins faire mine d’ignorer les intentions réelles de Hitler, donner l’impression de croire en ses promesses de ne plus toucher aux frontières… Emmanuel Macron, Olaf Sholtz ou Liz Truss, la nouvelle première ministre anglaise, ne peuvent faire semblant d’ignorer la suite de l’histoire. Leur choix est simple: signer des accords de Munich version 2022, c’est à dire accepter l’annexion d’une partie du territoire ukrainien par la Russie, en sachant que Vladimir Poutine ne s’arrêtera pas là et que cela pourrait nous mener de toutes façons à une extension de la guerre en Europe, ou tout faire pour obliger le tyran à retirer ses troupes d’Ukraine, sans savoir vraiment où cela nous mènera.

Apparemment ils ont choisi. Les pays du G7 ont officiellement annoncé qu’il ne reconnaîtraient jamais l’annexion. C’était le seul choix possible au regard de l’Histoire. Mais c’est aussi le saut dans l’inconnu. Jusqu’à présent, les pays occidentaux ont dansé sur une corde raide: sanctionner la Russie en continuant à acheter (moins) son pétrole et son gaz, fournir des armements aux Ukrainiens sans pour autant entrer en guerre avec la Russie. Une stratégie qui a porté quelques fruits, si l’on en croit les victoires que l’armée ukrainienne semble remporter sur le terrain. Mais qui a ses limites. La guerre n’est pas finie, et dès lors qu’on refuse l’annexion des zones occupées, il faut maintenant aller jusqu’au bout et chasser l’occupant russe d’Ukraine. Et ce ne sont pas les sanctions supplémentaires, annoncées à Bruxelles, aussi légitimes soient-elles, qui changeront le destin des ukrainiens.

Dans son discours, c’est une véritable guerre des civilisations que nous a annoncé Poutine. C’est une croisade contre les pays occidentaux que prétend mener le maître du Kremlin. Combien de temps pourrons nous subir cette guerre sans nous y impliquer vraiment? Pouvons-nous espérer faire reculer le tyran en nous contentant de laisser les Ukrainiens se battre pour nous? Nos livraisons d’armes même augmentées seront-elles suffisantes pour que l’Ukraine défasse l’armée russe? Peut-on imaginer que Poutine aille jusqu’à la capitulation sans utiliser l’arme nucléaire dont il dispose?

Personne aujourd’hui n’a de réponse à ces questions. Les précédentes crises de l’après-guerre, au cœur de la guerre froide, avaient pu être résolues parce qu’aucun des protagonistes n’avait franchi le point de non-retour. Aujourd’hui on peut se demander si avec l’annexion des territoires ukrainiens, Poutine n’a pas franchi ce point de non-retour. Comme Hitler avec l’annexion des Sudètes.

Qui pourra le faire reculer? Sans doute pas l’OTAN, que l’Ukraine voudrait intégrer au plus tôt. Un choc OTAN-Russie déboucherait sur un cataclysme assuré. Peut-être l’armée russe elle-même, qui pourrait se lasser de l’humiliation qu’elle subit sur le terrain, et se retournerait contre le maitre du Kremlin? Mais on hésite à parier le moindre kopeck sur cette hypothèse. Reste à miser sur la communauté internationale. Sur ces grands muets que sont la Chine et l’Inde. On les a vu s’abstenir sur une résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU condamnant l’annexion russe. Pourrait-on les convaincre de sortir de leur neutralité et de s’engager réellement pour faire reculer le maître du Kremlin? On peut imaginer qu’une pression conjuguée de ces deux géants jusqu’ici “neutres” puisse avoir un impact réel. Mais encore faut-il les convaincre de s’investir dans le sauvetage d’un équilibre international dont ils jugent qu’il ne leur fait pas une place suffisante. C’est sans doute l’urgence qui s’impose aux pays occidentaux. Convaincre la Chine de peser de tout son poids dans la balance de l’équilibre planétaire et de la paix. Mais cela passe par la remise à plat de cet équilibre, et la redéfinition des relations internationales en respectant la place de chacun, en tournant définitivement la page précédente, celle d’un monde bipolaire où l’Amérique exerçait sa suprématie, et dont la crise actuelle est un des derniers avatars.

Redevance télé: le faux débat

L’indépendance de l’audiovisuel public est-elle menacée? Oui, si l’on en croit les stars des chaines publiques qui se relaient pour demander le maintien de la redevance, comme garantie de leur indépendance. Pas du tout, répond le gouvernement qui promet de pérenniser le financement en prenant sur le produit de la TVA.

C’est évidemment un faux débat! Ce n’est pas la redevance qui fait l’indépendance de l’audio-visuel public -la redevance existait déjà du temps de l’ORTF qui ne brillait pas par son impertinence- pas plus que le financement par la TVA ne la garantira. Ce qui fait l’indépendance d’un média, c’est d’abord le professionnalisme, et l’exigence déontologique de ses journalistes, la qualité et l’exigence de sa gouvernance, et accessoirement, la pertinence du contrôle exercé par l’éventuelle autorité indépendante de tutelle.

Que le budget de France-Télévision, ou de Radio-France, émane de la redevance versée par les détenteurs de téléviseurs, ou soit prélevé directement sur la TVA ou le budget de l’Etat, ne change rien, si les sommes sont votées et garanties sur la durée par la représentation parlementaire, et si leur utilisation est contrôlée par une autorité indépendante. L’argument de l’indépendance n’est donc pas vraiment recevable et reflète sans doute plus les propres angoisses de la profession quant à l’évolution de l’exercice du métier. La prise en main par Vincent Bolloré de la destinée de la galaxie Canal plus, et la dérive partisane d’extrême droite qui en suivit pour la chaîne en continu Cnews, ont évidemment mis en avant de façon brutales les risques de la privatisation des sociétés d’information. L’appartenance à la sphère publique de certains médias, leur contrôle par une autorité de tutelle indépendante, sont évidemment dans ce cadre des garanties démocratiques, et l’on ne peut reprocher aux professionnels qui y travaillent d’appréhender les conséquences d’une éventuelle privatisation. Mais on en est pas là! Substituer l’impôt à la redevance n’est pas privatiser.

Reste le bruit de fond qui entoure cette affaire, au terme d’une campagne électorale où le service public a parfois donné l’impression de faire la part belle à l’opposition. Impression justifiée à certains moments si l’on en croit les relevés effectués par l’autorité de tutelle. Par exemple entre le 2 et le 27 mai, l’Arcom décompte sur France Inter un temps de parole de 1h et 3 minutes pour la France Insoumise, contre 25 minutes pour Renaissance, le parti présidentiel. S’ajoutent pour la gauche sur la période 42 minutes pour le Parti socialiste, 23 minutes pour le Parti communiste et 19 pour les écologistes. Effectivement le déséquilibre est patent, même lorsqu’on ajoute une minute de prise de parole pour le parti Horizons d’Edouard Philippe. Mais on fera valoir à France Inter comme à France 2, où l’on retrouve des résultats comparables, que l’équilibre a été rétabli par la suite. On ne peut donc pas dire que sur l’ensemble de la période électorale les médias publics aient outrageusement supporté un camp politique ou l’autre.

C’est en fait plus du côté du professionnalisme que les médias publics, autant que les privés d’ailleurs, méritent un examen critique. Avec la multiplication des télévisions d’informations en continu et l’explosion des réseaux sociaux, les journalistes ont été peu à peu aspirés par une logique de “buzz”, de la recherche de trafic, qui n’a plus grand chose à voir avec l’explication et la confrontation des faits. Pire, dans la hiérarchie de l’information, les faits se sont peu à peu effacés derrière le ressenti, et l’explication et l’analyse derrière l’opinion. Le micro-trottoir, consistant à livrer brut de décoffrage le commentaire sur l’actualité d’un quidam ne disposant d’aucune expertise, s’est imposé comme genre journalistique majeur. Les émissions d’opinion rassemblant des “influenceurs” dont la principale compétence est l’aptitude à émettre des jugements définitifs sur tout et n’importe quoi, se sont multipliées. “Informés” ici, “Grandes gueules” là, toujours capables de faire le buzz sur internet en délivrant les jugements les plus outranciers sur tous les sujets.

Evidemment la “neutralité”, c’est à dire le non parti-pris, du service public en a pris un coup. Vous ne pouvez pas faire des audiences record avec des propos simplement mesurés, nuancés, relativisés, voire contextualisés. La dictature de la “punchline”, c’est à dire du jugement choc, a peu à peu emporté les réflexes professionnels -vérification de l’information, respect du caractère contradictoire, séparation des faits et du commentaire…- la course de vitesse permanente a gommé les exigences de rigueur des rédactions. Et tout cela va bien au delà des campagnes électorales?

Le traitement par les chaines de télévision, publiques et privées, de la crise du Covid a constitué la première démonstration en grandeur réelle de la dégringolade du professionnalisme du journalisme audio-visuel. La multiplication des pseudo-experts médicaux sur les plateaux télés, venant donner leur opinion sur la maladie et les mesures à mettre en œuvre, sans pouvoir justifier de véritable qualification, voire au nom d’un engagement politique non divulgué au public, la généralisation des micro-trottoirs, appelant chaque quidam à commenter et critiquer les mesures de santé publique, la reprise régulière de fake-news, sans aucune vérification, à l’abri d’un micro sensé relativiser le propos, ou sous la caution d’une expertise imaginaire, auront pourri le débat et conduit à la crise de la vaccination que nous avons connue. Sans que les chaînes en tirent la moindre leçon, puisque le défilé des yakafokon s’est poursuivi, sitôt après, avec la crise ukrainienne.

Alors bien sûr, il reste sur les chaînes publiques, et privées, des journalistes qui tentent de faire correctement leur travail. Il y a de vrais professionnels, qui préfèrent enquêter sur le terrain, que donner leur opinion sur les plateaux, on les a vus au travail par exemple en Ukraine. Des journalistes pour qui, comme on le revendiquait jadis, les faits passent avant les commentaires. Qui ne confondent pas investigation, et enquête à charge , analyse et réquisitoire, indépendance et opposition systématique… Que l’audiovisuel public soit financé par la redevance audiovisuelle ou un prélèvement sur la TVA, devrait faire peu de différence pour eux.-

Le pari à risque de Mélenchon

Que cherchent exactement les députés de la France Insoumise au Parlement? On a compris qu’ils refuseraient systématiquement de soutenir quelque mesure gouvernementale que ce soit, c’est leur droit le plus strict. On a pu aussi mesurer depuis une semaine leur capacité d’invective, leur pouvoir de nuisance dans les débats, la violence de leurs arguments, leur capacité à transformer en farce les débats parlementaires. On a vu l’hémicycle se faire cour de récréation où tout est permis: procès d’intention, injures, mais aussi dérision, et surtout, décrédibilisation des débats, et donc de la démocratie. Mais tout cela pour en arriver où? Quelle est leur stratégie?

Etant minoritaires, même forts du soutien aveugle des autres partis de la Nupes, ils savent évidemment qu’ils n’ont à peu près aucune chance de faire chuter le gouvernement par l’adoption d’une motion de censure. Ils peuvent espérer tout au plus à la faveur d’un manquement du parti majoritaire faire adopter à la sauvette, avec le soutien du Front National l’un ou l’autre de leurs amendements, mais qui ne pourrait qu’être retoqué en deuxième lecture. Maigre butin en perspective. Même si l’amendement concerné est aussi ludique et abscons que celui qu’ils ont proposé en vain en début de lecture du projet de loi sur le pouvoir d’achat pour remplacer l’appellation “prime Macron”, par “prime d’enfumage”!

La stratégie consistant à multiplier les incidents dans l’hémicycle, chahuter les ministres, risque de trouver ses limites, dans l’opinion publique, mais aussi, l’espèrent-ils sans doute, dans la capacité de tolérance d’Emmanuel Macron. On peut imaginer que le président réélu ne rêvait pas d’un deuxième quinquennat de bataille de chiffonniers. Il ne pourra pas se représenter à l’issue des cinq ans, et donc pourrait assez vite se lasser d’une situation de conflit parlementaire permanent rendant toute réforme à peu près impossible. Et c’est sans doute une part du calcul fait par Jean-Luc Mélenchon: pousser le président à bout pour qu’il décide au plus tôt d’une dissolution de l’Assemblée qui renverrait tout le monde aux urnes, et permettrait -peut-être- enfin au patron de la France Insoumise de décrocher le poste de Premier Ministre convoité, voire de pousser Emmanuel Macron à la démission pour rejouer à son profit la présidentielle.

Si le calcul est celui-là, il n’est évidemment pas sans risque. D’abord, il y a des précédents. Celui de Jacques Chirac tentant d’utiliser la dissolution pour renforcer sa majorité et y gagnant au final cinq ans de cohabitation avec Lionel Jospin. Ou encore celui du Général de Gaulle utilisant la dissolution en 1968 en pleine crise économique et sociale, et décrochant quelques semaines plus tard une majorité absolue de députés. Ensuite il y a la question du délai. Pour que ce pari puisse être gagnant, il faudra qu’au moment d’une éventuelle dissolution du parlement, l’élan dont a profité la Nupes en juin dernier subsiste et soit encore renforcé, pour que Jean-Luc Mélenchon ait une chance de s’imposer comme premier-ministre. Si la dissolution n’intervient pas rapidement, les électeurs pourraient au contraire être lassés des provocations permanentes de la Nupes et de son refus de jouer un rôle plus constructif au parlement.

On note déjà, dans un sondage BVA réalisé ces derniers jours que 71% des Français souhaitent que l’opposition joue le jeu du compromis et négocie avec la majorité présidentielle. Pire, il n’y a que dans les rangs des sympathisants de la France Insoumise que l’on trouve une majorité d’adeptes du refus du compromis (55%), 80% des électeurs proches d’EELV ou le Parti socialiste seraient plutôt adeptes de la négociation. Evidemment c’est ici qu’Emmanuel Macron et son gouvernement vont tenter d’enfoncer un coin. En acceptant certains compromis demandés par les partis d’opposition les moins radicaux. C’est ainsi que l’amendement proposé par les écologistes dans le cadre du projet de loi sur le pouvoir d’achat, pour une utilisation d’huile de friture usagée comme carburant pour les voitures, carburant supposé plus écologique et économique, a été soutenu par le gouvernement. De même Les Républicains ont obtenu dans le cadre du budget rectificatif de 2022, que les jours de RTT non pris pendant l’année puissent être payés aux salariés qui le souhaitent. Un symbole fort: il s’agissait d’une promesse de campagne présidentielle de… Valérie Pécresse. De façon plus marginale, un amendement communiste proposant que le Comité d’entreprise soit consulté préalablement et pas seulement informé de l’attribution de la prime Macron défiscalisée, a été adopté.

Bien sûr la première condition pour que le pari de Jean-Luc Mélenchon soit gagnant, c’et que l’alliance qu’il a construite, voire imposée, au PS aux écologistes et aux communistes, résiste elle-même à l’épreuve du temps. Ce n’est pas encore gagné non plus. Déjà lors du vote sur le projet de loi sur le pouvoir d’achat, 17 députés socialistes se sont abstenus, alors que la majorité des communistes, écologistes et insoumis votaient contre. Et les causes de différends entre les différents partis formant la Nupes, pourraient se multiplier si la France Insoumise continue à tenter d’imposer sa ligne idéologique à ses partenaires. A cet égard, le projet de résolution présenté par des responsables insoumis et communistes concernant l’Etat d’Israël et proposant que la France condamne “l’institutionnalisation par Israël d’un régime d’Apartheid à l’égard du peuple Palestinien” et désignant le peuple israélien de religion juive comme un “groupe racial” a jeté un froid chez les élus socialistes. La poursuite d’une stratégie de conflictualisation, et de provocation, à outrance, pourrait donc sonner le glas des ambitions du parti de Jean-Luc Mélenchon. Mais plonger la vie parlementaire dans un chaos ingérable.

A qui pourrait profiter ce chaos? On l’a vu De Gaulle avait su profiter de la “chienlit” pour se tailler une assemblée sur mesure. Il n’est pas du tout certain qu’Emmanuel Macron, même si sa popularité progresse de 5 points en juin (sondage BVA) puisse profiter de la crise. Marine Le Pen est en embuscade et pour l’instant joue sa partition sans faute. Principal vainqueur du scrutin législatif de cette année avec ses 88 députés, contre 8 en 2017, le Rassemblement National évite de se mêler à la cohue législative alimentée par la Nupes. Apportant son vote aux textes jugés utiles, tout en critiquant leur insuffisance, il renforce son image de respectabilité et de sérieux, pour préparer la suite. Et de fait on ne peut exclure que par lassitude les électeurs finissent par se persuader que leur seule chance d’échapper au chaos serait de tenter la solution d’extrême droite. La dégradation brutale de la situation politique en Italie, avec la démission de Mario Draghi, vient de nous rappeler que l’extrême-droite populiste que l’on croyait écartée du pouvoir, reste aux marches du palais.

La leçon d’un premier camouflet

L’apprentissage risque d’être difficile. Après des décennies -à quelques parenthèses de cohabitation près- de domination sans partage du parti présidentiel à l’Assemblée, on (re)découvre le pouvoir des minorités. Pouvoir de jouer la montre, lorsqu’il s’agit simplement de passer deux jours à discuter une motion de censure qui n’a aucune chance d’aboutir… Pouvoir de contrarier l’action du pouvoir lorsqu’il s’agit de s’unir, toutes oppositions confondues, pour bloquer un projet gouvernemental. Une semaine aura suffi pour en faire l’expérience. Lundi le vote de la motion de censure a renvoyé la Nupes (Nouvelle Union Populaire Ecologiste et Sociale) à ce qu’elle est réellement: une formation politique minoritaire ayant perdu l’élection législative. Le lendemain, c’est le parti du gouvernement qui a été renvoyé à son poids réel: une formation disposant d’une majorité relative qui ne lui permet plus de faire la pluie et le beau-temps législatif sans se préoccuper des autres.

On pourrait donc dire que la leçon est bénéfique pour les uns comme les autres. A force de répéter, sous l’impulsion de son gourou Mélenchon, que la majorité avait perdu les élections législatives, la gauche avait fini apparemment par se convaincre qu’elle les avait gagnées. Quant à la majorité, il importait qu’elle mesure que ce n’est pas en formulant quelques vœux pieux de collaboration avec l’opposition, qu’elle allait retrouver des conditions confortables d’exercice du pouvoir. C’est fait. Les uns et les autres viennent de prendre une leçon de réalisme politique.

Tout au plus peut-on, avant de s’en réjouir, regretter que les protagonistes du premier affrontement politique du nouveau quinquennat aient choisi comme champ de bataille le terrain de la sécurité sanitaire de nos concitoyens. Que la première manifestation d’union de l’arc en ciel d’opposition de l’extrême droite à l’extrême-gauche, porte sur le passe sanitaire, et donc sur la politique de vaccination contre le covid est bien affligeant. On peut même y voir quelque ironie, puisque le Rassemblement national qui plaidait il y a peu, pour un blocage total des frontières pour protéger les Français du Covid, se retrouve aux côtés des socialistes, qui défendaient il y a peu la vaccination obligatoire, pour empêcher le gouvernement de rétablir… un contrôle de la vaccination aux frontières.

En fait il est clair qu’il s’agit d’un prétexte. Le seul but de la démarche commune des oppositions était d’infliger un camouflet au gouvernement, en le mettant ponctuellement en minorité. Et tant pis si c’est à la joie des antivax et antiscience de tout crin.

Il faut dire que la majorité ne l’a pas volé non plus. Car le score atteint par les oppositions sur leurs deux votes gagnants (contre le pass sanitaire pour les mineurs et contre la possibilité du retour d’un contrôle du pass aux frontières) respectivement 196 voix et 219 voix, est inférieur au nombre de députés appartenant à la majorité (245). Au moment du vote certains élus macronistes avaient sans doute affaire ailleurs, et n’ont pas participé au vote. Funeste erreur quand on ne dispose que d’une majorité relative. Et avertissement pour la suite.

En fait la leçon à tirer va bien au delà de la nécessaire assiduité des élus. L’affaire du pass sanitaire démontre qu’il n’est plus possible de faire de la politique comme avant. Elle prouve à la majorité parlementaire qu’au delà des déclarations d’intentions, il va falloir réellement s’atteler à négocier des consensus pour pouvoir faire adopter les textes. Présenter un projet de loi sans s’être assuré qu’il est validé par une partie au moins des députés du camp adverse, c’est prendre le risque d’être battu et donc rendu impuissant. Certes le rejet de la motion de censure a démontré que la Nupes et le Rassemblement National n’étaient pas prêts à faire cause commune pour déclencher une crise dont aucun des protagonistes ne connaissaient l’issue, mais l’union des oppositions jouera chaque fois qu’il sera possible de faire trébucher le gouvernement à moindre frais. Chaque projet ne résultant pas d’un compromis sera voué à l’échec. Bien sûr, pour faire des compromis, il faut des interlocuteurs bienveillants, mais les soutiens d’Emmanuel Macron auraient tort de se retrancher derrière l’intransigeance de leurs oppositions. C’est à eux, à qui les électeurs ont confié la mission de gouverner à deux reprises, à la présidentielle et aux législatives, qu’il appartient de créer les conditions de ces consensus, sur chaque projet, chaque décision, en associant systématiquement à leur travail des députés d’autres partis qui souhaitent faire avancer le pays… Ou alors, il faudra demander au président de dissoudre et choisir l’aventure, voire le saut dans le vide, pour le pays, et nos concitoyens.

Une chance à saisir?

Et si le résultat sorti des urnes ce dimanche, constituait une chance à saisir pour la classe politique française? Bien sûr, c’est d’abord un séisme, un échec terrible pour le Président de la République, une grande première dans l’histoire de la cinquième république, une menace grave sur la stabilité, la perspective d’une France ingouvernable, la fin des réformes, la garantie de l’affrontement permanent, et tout et tout… Bref le retour du spectre de la paralysie publique que l’on croyait avoir conjuré depuis 1958. Mais encore?

Pour la première fois en dehors des périodes de cohabitation (à deux reprises) ou de fronde (sous Hollande) le président de la République fraichement élu ne disposera pas d’une majorité automatique à l’Assemblée Nationale. Il lui manquera 44 députés (s’il parvient à maintenir la cohésion des siens) pour atteindre la majorité absolue. Si l’on suppose que la Nupes constituée sous les directives de Jean-Luc Mélenchon, conserve son intégrité de force d’opposition, seule la droite, LR + UDI, avec ses 64 élus pourrait constituer la force d’appoint nécessaire. Cela supposerait une alliance entre LR et le parti d’Emanuel Macron, qui parait assez hypothétique à ce jour. Si Jean-François Copé a plaidé pour un “pacte de gouvernement” dès les résultats connus, Eric Ciotti et Christian Jacob ont tout de suite rejeté l’idée, confirmant qu’ils sont et resteront dans l’opposition. Or s’il n’y a pas d’alliance formelle avec un parti d’opposition, Ensemble, le parti d’Emmanuel Macron va devoir “bricoler”.

Bricoler, cela veut dire chercher des majorités de circonstances à chaque projet de loi. On peut imaginer par exemple qu’une partie des députés de droite soient disposés à voter un projet de réforme des retraites. Ou encore qu’une partie de la gauche se laisse convaincre sur un projet de nature à améliorer le pouvoir d’achat. Mais évidemment, à la différence de la majorité absolue du quinquennat précédent, cela n’aura plus rien d’automatique. Il faudra convaincre les soutiens d’un jour pour les rallier. Il faudra donc accepter qu’ils mettent leur grain de sel, apportent leurs propres suggestions et critiques, leurs amendements, aux projets qu’on leur demandera de voter. Bref, il faudra négocier! Pour trouver à chaque projet un compromis acceptable par une majorité de députés. Tout le contraire des habitudes de la Cinquième république et, il faut bien le dire, d’Emmanuel Macron.

Jusqu’ici on ne peut pas dire que le président ait démontré un grand talent dans la recherche de compromis avec l’opposition. Voire dans la négociation avec les partenaires sociaux ou les milieux associatifs. Fort d’une majorité absolue, dont on ne peut pas dire qu’elle l’ait beaucoup bousculé sur ses projets, il a plus imposé ses idées que cherché à négocier. Il n’est pas le premier, tous les présidents de la Cinquième République se sont comportés de la même manière, chacun s’attachant à imprimer sa marque, faire ses propres réformes, quitte à voir son successeur les défaire à l’échéance électorale suivante. C’est ainsi que ce pays change de projet éducatif, mais aussi de régime fiscal, de politique sécuritaire, voire de modèle social à intervalle régulier, faute d’avoir pu définir sur des sujets essentiels un modèle consensuel pérenne que plusieurs forces politiques, concurrentes par ailleurs, puissent s’approprier.

Et pourtant! Serait-il absurde d’imaginer, par exemple, qu’un projet éducatif puisse être partagé, parce qu’il résulte d’une négociation, et n’appartienne plus à tel ou tel ministre? Un projet éducatif que plusieurs forces politiques et syndicats soutiendraient, et qui bénéficierait enfin du temps indispensable pour obtenir des résultats, et donnerait envie aux personnels de l’éducation de s’investir sur la durée. On se met d’accord et pendant dix ans on n’y touche plus, jusqu’à ce qu’on puisse en mesurer les résultats… Chiche!

Au moment où la question de la préservation du climat semble faire consensus parmi les forces politiques n’est-il pas également possible de négocier entre la majorité et une partie de l’opposition un ensemble de mesures de nature à apporter une première réponse à l’urgence de la situation? Au terme d’une vraie négociation, avec des concessions et compromis de part et d’autres, non pas pour arriver au projet idéal, mais juste pour faire avancer les choses ensemble, dans le bon sens.

Evidemment, on pourra toujours rétorquer que pour négocier il faut être deux, au moins, et que si cela ne marche pas c’est toujours la faute des autres. La période politique ultra-conflictuelle actuelle ne donne pas l’impression que les uns et les autres soient dans les bonnes dispositions d’esprit pour négocier ensemble des réformes. Depuis 5 ans on a plus entendu s’exprimer l’opposition systématique que l’esprit d’initiative et de proposition. Mais si, contraints et forcés par un scrutin aux résultats non prévus, qui fait la part belle au parlement aux partis extrémistes, quelques dizaines de députés de droite et de gauche acceptaient au coup par coup de jouer le jeu, pour éviter le pire… Si les partis qui se disent “de gouvernement” choisissaient le temps d’un mandat, d’accepter une forme de “cogestion” en sortant de l’opposition systématique, pour tenter d’influer sur les projets du gouvernement qui leur paraissent les moins inacceptables et en faire des projets partagés, comme cela se fait régulièrement dans d’autres pays européens… Si le Président de la République acceptait de considérer que les Français n’ont pas validé son programme en l’état, mais plutôt des orientations sur lesquelles il lui appartiendrait de rechercher un consensus national, par la négociation, avant de les transformer en projets, voire de reprendre quelques idées de ses opposants qui ne sont pas si éloignées des siennes… Ça nous changerait un peu des habitudes de la Cinquième République, mais cela vaudrait sans doute mieux que d’attendre le meilleur moment pour dissoudre une Assemblée nationale qui ne correspond pas à ses attentes, au risque de s’enfoncer encore un peu plus dans l’impasse démocratique.

Un double échec et un défi

Les lendemains électoraux se ressemblent. En général chacun tente de démontrer qu’il est finalement plus gagnant ou moins perdant que son voisin et concurrent. Le scrutin de ce dimanche a en tout cas consacré l’échec de la classe politique dans son ensemble, à l’exception du Rassemblement National de Marine Le Pen qui pourrait se retrouver avec un groupe parlementaire qu’il n’avait pas il y a cinq ans.

Et cet échec est d’abord collectif! A partager par l’ensemble de la classe politique, et le monde médiatique. Les uns et les autres auront tout fait, au delà même du raisonnable, pour convaincre les électeurs de l’importance du moment, enfilant vraies et fausses polémiques, coups de tonnerre et engueulades, prises de position caricaturales et accès de mauvaise foi, remise en question de la neutralité médiatique et omniprésence des commentateurs politiques. Les enjeux avaient été simplifiés à l’extrême pour aider les électeurs à s’y retrouver. A la présidentielle, il fallait faire échec à l’extrême-droite, pour une fois doublement incarnée dans ce qu’elle a de pire. Aux législatives on avait joué le remake du programme commun, comme pour rendre aux électeurs l’ambiance des jours heureux, pour la démocratie, où les taux de participation aux législatives dépassaient les 70%! On avait même brandi la menace de l’autre extrême, celle qu’incarne Jean-Luc Mélenchon pour ajouter à l’enjeu. Peine perdue. L’abstention a atteint hier son record absolu pour un premier tour de législatives, 52,49%. Plus d’un Français sur deux, apparemment, s’en fout, et personne ne peut s’en réjouir.

Cela étant dit, il reste ensuite à déterminer, comme toujours, qui a le plus gagné ou le moins perdu. A peser le poids du quasi-échec et de la semi-victoire. Et là, le trébuchet semble hésiter. Avec environ 26% des voix à des poussières près, les deux principales formations présentes aux législatives sont au coude à coude -il n’en fallait pas plus pour que pleuvent les accusations de tricherie-. Mais on peut en rester à un constat: “Ensemble” le regroupement qui soutenait Emmanuel Macron, et “Nupes” celui qui soutenait Mélenchon ont fait jeu égal. Et ce n’est une bonne nouvelle pour personne.

A tout seigneur tout honneur, le premier perdant est bien sûr le président. Elu au premier tour de la présidentielle avec près de 28% des voix, il voit le score de ses soutiens tomber à 26% avec une participation bien inférieure. Si l’on raisonne en pourcentage des inscrits 20% avaient choisi le programme du président sortant, le 10 avril, au premier tour de la présidentielle, ils ne sont que 12% à avoir choisi au premier tour des législatives de lui donner les moyens de le mettre en œuvre. C’est une première! Et cela ressemble fort, sinon à un changement d’avis du corps électoral, en deux mois, du moins à une absence totale de dynamique. Emmanuel Macron et ses soutiens ont échoué à impulser une dynamique de succès dans la foulée du premier tour de la présidentielle qui semblait pourtant indispensable dans la perspective des réformes annoncées. Echec d’autant plus visible si l’on compare aux résultats de 2017, où la République en Marche et le Modem dépassaient à eux-deux les 32% de suffrages exprimés.

Le second perdant, ou le premier par ordre décroissant d’égo (?), est Jean-Luc Mélenchon. Il avait parié sur Matignon, demandant aux Français de “l’élire premier-ministre”, alors même qu’il ne se présentait pas aux législatives! Il n’y est pas! Même si les sondages de deuxième tour de législatives sont toujours sujets à caution, on n’imagine pas qu’il puisse, à partir du score de parité du premier tour, décrocher la majorité absolue à l’Assemblée Nationale pour son camp. Pire, en pourcentage des suffrages exprimés, la Nupes reste loin du total des votes de gauche du premier tour de la présidentielle. 26%, contre un peu plus de 30%. Non seulement la dynamique Nupes n’a pas ramené aux urnes des électeurs de gauche déçus, mais visiblement la mayonnaise mélenchonienne n’a pas pris, malgré la soumission des partenaires de la France Insoumise, qui ont tout fait pour se couler dans le moule prévu pour eux. Et ce constat est confirmé lorsqu’on compare à 2017, puisque le regroupement mélenchonien retrouve à peu de choses près le résultats des partis de gauche au premier tour des législatives de 2017, alors qu’il n’y avait pas à cette époque de dynamique unitaire. La différence par rapport à il y a cinq ans, c’est que Jean-Luc Mélenchon n’est plus député et que le meilleur tribun de la gauche ne pourra plus faire entendre son bruit et sa fureur à l’Assemblée.

D’autres le feront à sa place. On peut s’attendre à voir sur les bancs de l’Assemblée Nationale une opposition d’extrême-gauche très fournie. L’OPA de Mélenchon sur la gauche, si elle ne l’a pas conduit au pouvoir, devrait permettre à son parti, qui disposait de 17 députés dans la mandature précédente, de peser beaucoup plus lourd comme première force d’opposition. Et de poursuivre avec plus de vigueur encore la stratégie de conflictualisation à outrance de son leader. Faut-il s’attendre pour autant à vivre dans un pays ingouvernable? Cela dépendra évidemment du résultat du second tour et de l’effet du mode de scrutin. On ne peut exclure que le coude à coude en voix du premier tour se traduise au second tour par une majorité absolue pour le Président, ce qui générerait on s’en doute une immense frustration et un grand sentiment d’injustice dans l’opposition. Mais cela reste moins probable qu’il y a cinq ans! Le président risque bien de se retrouver à gérer une majorité relative à l’Assemblée. Certes il pourrait toujours répondre à un déficit majoritaire par une nouvelle campagne de débauchage à droite, voire à gauche en jouant sur les dissensions entre les alliés de Nupes qui devraient s’exacerber avec la mise en retrait de Jean-Luc Mélenchon. Mais outre la difficulté d’un exercice, qui a déjà bien servi, la clarté de son engagement politique s’en trouverait bien affectée et ne ferait qu’accélérer le désamour des électeurs pour la chose politique.

Alors, et si l’heure n’était plus aux petits arrangements entre anciens ennemis, mais plutôt à la recherche de partenariats constructifs, pour la mise en œuvre de politiques publiques nouvelles, transpartisanes? Si la revalorisation de la politique et donc de la parole publique passait par une nouvelle ère de recherche de consensus autour de projets partagés avec les forces vives de la nation, syndicats, associations, mais aussi rivaux politiques, capables de trouver le chemin à des accords de programme dans l’intérêt du plus grand nombre? Sommes nous si atypiques en Europe que nos partis politiques, et on ne parle pas là des extrêmes, ne puissent s’entendre pour agir en commun dans l’intérêt de leur pays? S’il faut réformer les retraites, et les institutions, et adopter un plan d’urgence pour le pouvoir d’achat, et relancer la lutte contre la dégradation du climat… ne peut-on le faire par consensus ponctuels entre rivaux partageant le souci du progrès commun?

Notre système politico-électoral a probablement atteint ses limites. Il y a quelques semaines, en fin de campagne présidentielle, Emmanuel Macron se disait prêt à aller jusqu’à la proportionnelle intégrale. Il est temps de s’y mettre, intégrale ou pas. Et de redonner un second souffle à notre démocratie tant qu’il reste des électeurs. Ce ne sera pas facile. Les politiques français n’ont pas la même culture de la négociation et du compromis que leurs homologues européens. Mais si l’on veut sortir de cette étrange guerre civile qui s’installe sur les réseaux sociaux et les chaînes d’info, il va falloir s’y faire. La représentation nationale doit redevenir plus conforme aux aspirations des électeurs, et les hommes politiques trouver ou retrouver le chemin du dialogue.

On connaît les dangers de la proportionnelle. La quatrième République les a illustrés. Mais c’était il y a plus d’un demi-siècle. Entre-temps, les Allemands ou les Espagnols, et d’autres encore en Europe et ailleurs, nous ont montré qu’un système de représentation parlementaire proportionnelle pouvait être viable et parfois même diablement efficace. Alors ne perdons pas de temps, inventons dès maintenant des solutions nouvelles pour associer plus étroitement le peuple de France à l’action publique, pour mieux représenter aupour construire l’avenir avec tous, syndicats, associations, partis politiques, avant qu’à force de tout conflictualiser, on ait fini par détruire tout ce qui finalement ne marche pas si mal.

Un (troisième) tour a haut risque

Nous voici dans la phase d’approche finale, avant l’arrimage démocratique. Après deux campagnes présidentielles nourries surtout de polémiques et contestations anticipées de la légitimité du scrutin, et donc du vainqueur, et une campagne législative qu’on a cherché à présenter comme la session de rattrapage de l’élection précédente, le premier coup de gong sonnera à 20 heures dimanche soir. Certes, la messe ne sera pas encore dite, puisque nous ne connaîtrons que le pourcentage de voix obtenus par les différents blocs en compétition, c’est le second tour qui déterminera, avec le nombre de députés élus de chaque camp, la capacité à gouverner des aspirants à l’exercice du pouvoir, en commençant bien sûr par le président élu.
Mais le résultat du 12 juin pèsera lourd, très lourd. Il nous dira si le peuple de France a ou pas changé d’avis en quelques semaines. S’il préfère aujourd’hui voir mettre en œuvre le programme qu’il a rejeté au premier tour de l’élection présidentielle, celui de la France Insoumise. Formulée ainsi, l’hypothèse a quelque chose d’absurde. Mais c’est Jean-Luc Mélenchon et son camp qui l’ont voulu ainsi. En posant dès le lendemain du premier tour de la présidentielle l’équation de l’illégitimité du président («un président sans mandat»), et donc de l’élection elle-même, ils ont installé l’idée que les législatives étaient le véritable aboutissement du processus électoral. Que l’élection d’un président de la République était une formalité institutionnelle sans conséquence réelle, et que le véritable pouvoir de gouverner résultait des alliances constituées entre les partis politiques au moment des législatives. 

Parlementarisation à la hussarde

On pourra rétorquer que c’est devenu la logique des institutions depuis que les échéances présidentielle et législatives ont été confondues, les secondes arrivant dans le calendrier juste après la première. Mais cette modification de calendrier avait pour but d’éviter justement la cohabitation entre un Président d’un bord et une Assemblée nationale opposée à sa politique, situation que l’on avait connue précédemment lorsque les mandats étaient découplés. Les alliances et ralliements étaient dorénavant supposés se faire entre les deux tours de la présidentielle pour amener à l’Elysée le candidat le plus à même de créer un consensus de nature à lui garantir une majorité législative quelques semaines après son élection.

En acceptant, sans discuter ou presque, la logique, mais aussi la tutelle, de la France Insoumise, après la présidentielle perdue, socialistes, écologistes et communistes, ont changé la donne et apporté leur soutien à cette tentative de parlementarisation à la hussarde de la 5eme République. En s’alignant sur le programme de la France Insoumise -qu’ils avaient dénoncé au moins pour partie durant la campagne présidentielle- au point de renoncer le temps des législatives à certains de leurs propres engagements fondamentaux sur l’Europe ou le rapport à l’économie et aux institutions, et en acceptant de se ranger derrière un Mélenchon autoproclamé “premier ministre”, ils ont eux-mêmes créé cette situation de quitte ou double, en faisant un pari fou: préserver à n’importe quel prix quelques sièges de députés au risque de créer une crise institutionnelle aux conséquences imprévisibles.

Ce qui se résout en général dans un régime parlementaire par une recherche de compromis, d’équilibres, entre les différentes forces politiques, dans l’intérêt supérieur de la Nation, dans le cadre d’une cohabitation plus ou moins heureuse, se réglerait ici par la mise du président de la République au musée Grévin un mois après son élection, et la prise de tout le pouvoir par le nouveau chef coopté d’avance par l’ensemble des partis de sa coalition pour mettre en œuvre un programme, déjà rejeté par les électeurs, et que ses alliés n’ont même pas eu le loisir de négocier. Et cela, paradoxe des paradoxes, alors que le chef autoproclamé lui-même, qui vient d’être battu au premier tour de la présidentielle, sur son propre programme, n’a même pas osé se représenter aux électeurs pour ces législatives qui sont supposées “l’élire premier-ministre”!

Si l’on en croit les sondages, les chances de l’alliance mélenchonienne d’obtenir les 289 députés nécessaires pour imposer sa loi au Président de la République sont assez faibles. Et donc l’hypothèse de voir au lendemain du 19 juin tous les pouvoirs aux mains de partis qui au fond sont en désaccord sur l’essentiel -la place de la France dans le monde et l’Europe, mais aussi la gestion de l’économie, le rôle de l’Etat, ou encore le changement de République- reste peu probable. Mais la capacité de nuisance du processus mis en route par la France Insoumise avec la complicité active des dirigeants du PS, du PC et de EELV, reste très élevée. Si dimanche soir, du fait d’une abstention élevée, il se trouve une majorité relative d’électeurs pour soutenir le projet populiste, autoritaire, anti-européen, de Jean-Luc Mélenchon, projet que les autres partis de gauche avaient rejeté avant la présidentielle mais qu’ils font mine de soutenir aujourd’hui, nous entrerons dans une crise de régime. Que les électeurs choisissent majoritairement, fut-ce de quelques voix, la mise en œuvre d’un programme politique diamétralement opposé à celui que porte le président qu’ils ont élu le 24 avril dernier, créerait une situation inédite. Et l’arrivée éventuelle le 19 juin d’une majorité de députés soutenant le président élu, grâce à un mode de scrutin injuste, ne changerait rien au fond de la crise démocratique, mais la cristalliserait.

Conflictualisation à outrance

C’est dans la logique de la conflictualisation à outrance voulue par la France Insoumise et son leader: aboutir à la crise ultime de nature à faire imploser la 5eme République, comme prémisse à l’établissement d’une Nouvelle (?) République qu’ils appellent de leur vœux. Pourquoi pas? On peut toujours en accepter l’augure, en se disant que notre démocratie a bien besoin de retrouver des couleurs, que le caractère quasi-monarchique de l’exercice du pouvoir présidentiel en France est dépassé, que notre système électoral qui conduit à une sous-représentation systématique au Parlement de toutes les minorités, surtout depuis que les échéances présidentielle et législatives ont été confondues, est tout à fait indigne, que la place qui est faite aux corps intermédiaires et à la société civile dans la décision politique est tout à fait insuffisante, et qu’après tout… la crise à venir pourrait jouer le rôle d’accélérateur de changements nécessaires. Certes, mais à quel coût?

Faut-il pour rendre notre République plus juste en passer par l’implosion de notre système démocratique? Pour la rendre plus égalitaire risquer la ruine du pays? Faut-il pour rendre du pouvoir à la société civile commencer par rendre à l’Etat toutes les prérogatives cédées au fil du temps à la société civile en question? Faut-il, pour revenir sur un excès supposé du libéralisme économique, mettre en place la planification de toute l’activité économique par un groupe d’apparatchiks issus du parti dominant? Faut-il décréter une chasse aux riches sans merci, au risque de casser le développement économique du pays qui pourrait pourtant offrir les moyens nécessaires à une politique sociale plus audacieuse? Faut-il pour défendre le droit à l’autonomie de la Nation détruire le projet européen? La conflictualisation maximale de la vie politique est-elle notre seul horizon? Première réponse dimanche!

Ne tirez pas sur la Justice, nous sommes tous cachés derrière !

«On ne peut pas se cacher derrière la justice!» On peut considérer que c’est la phrase du jour, voire de la semaine, prononcée par François Ruffin, le député-candidat de la France Insoumise. Autrement dit, une décision de justice ne vaut pas grand chose face à la parole d’une victime. C’est aussi ce qu’explique Sandrine Rousseau l’ex-candidate à la primaire présidentielle écologiste, et candidate aux législatives investie par la nouvelle Union Populaire de la gauche, qui ne comprend pas que le gouvernement n’écarte pas Damien Abad mis en cause dans une affaire de viol classée sans suite par la justice. Le “principe de précaution”, nous dit-elle, devrait conduire à l’écarter du gouvernement, puisqu’une femme a témoigné contre lui.

On peut penser ce que l’on veut de Damien Abad et de la valeur ajoutée qu’il apporte ou apportera au gouvernement ou de l’opportunité de son débauchage. Ce “principe de précaution”, revendiqué par la militante écolo-féministe, s’appelle en réalité négation de l’état de droit. Comprenons nous bien. Qu’il faille favoriser la prise de parole des femmes dans les affaires de violences sexuelles pour leur permettre d’échapper à la pression de leurs agresseurs est une certitude. Que les mots d’accusation d’une femme contre un agresseur soit écoutés et respectés, par principe, est légitime et nécessaire… Jusqu’à une limite! Jusqu’au moment ou la justice, qui doit être saisie, se prononce et établisse les faits. Dans le cas de Damien Abad la justice a considéré, à deux reprises qu’il n’y avait pas lieu de donner une suite aux plaintes formulées contre lui. Damien Abad n’est donc à cette heure coupable d’aucun crime ou délit.

Et ce n’est pas une insulte faite aux femmes que de “se cacher derrière la justice”. C’est tout simplement un principe républicain de base. Seuls les juges ont dans nos sociétés le pouvoir de juger et condamner. Pas les organisations politiques, ni même les associations de militantes d’extrême-gauche, même pompeusement parées du titre d'”Observatoire des violences sexistes et sexuelles”. Le pilori n’entre pas dans la culture démocratique, la libération de la parole des femmes ne doit pas être confondue avec un droit à la délation.

Depuis février 2021, les parquets ont reçu la directive de leur ministre d’ouvrir une enquête à chaque dénonciation d’agression sexuelle contre des mineurs, même lorsque les faits dénoncés sont prescrits. Cela doit permettre de restaurer les victimes dans leurs droits à la reconnaissance, malgré la prescription, mais aussi de découvrir éventuellement des victimes pour lesquelles le délai de prescription ne serait pas écoulé. Mais même dans ce cadre, évidemment, les juges continuent à faire leur travail et à classer les dossiers qui ne semblent pas étayés. C’est ce que vient de faire le parquet de Paris à la suite du signalement concernant Damien Abad, qui lui était adressé par l’association créée en février dernier par les amies de Sandrine Rousseau. Le signalement ne permettait pas en effet aux juges d’identifier la victime et donc de prendre son témoignage.

Evidemment, l’anonymat ne favorise pas l’action publique. Or dans le cas d’espèce, la jeune femme qui se dit victime de Damien Abad refuse de dévoiler son identité. C’est donc à partir d’une affaire classée sans suite, et d’un témoignage anonyme, que la France Insoumise dénonce “le gouvernement de la honte”! Bien sûr la bonne foi n’est pas la denrée la plus fréquente sur les estrades des campagnes électorales, mais tout de même! Ne pourrait-on attendre de candidats à la députation (voire au gouvernement de la France, si l’on en croit les ambitions de Jean-Louis Mélenchon) qu’ils affichent un respect minimal de l’Etat de droit. Soit les militantes féministes qui crient au scandale sont persuadées de la culpabilité de Damien Abad, et il leur reste à convaincre la victime dont elles ont recueilli le témoignage de porter plainte, soit il faut passer à autre chose. La justice ne peut être rendue que par la confrontation des arguments. l’anonymat ne le permet pas.

On peut noter que cet argument de l’anonymat avait déjà été évoqué par les militantes de la France Insoumise dans le cas de Taha Bouhafs, le militant insoumis à qui l’investiture législative fut retirée, à la suite d’une mise en cause pour viol auprès de la commission interne du mouvement. Clémentine Autain, députée FI, expliquait alors que les victimes ne porteraient pas plainte pour ne pas alimenter “la campagne de haine raciste” de l’extrême-droite. Et la militante de prendre en exemple la réactivité de la commission interne de FI capable de rendre la justice en trois jours. Le hic, c’est que la commission ad-hoc n’est pas vraiment habilitée, même, peut-on espérer, dans le monde rêvé des mélenchonistes, à rendre la justice. Un viol est un crime, particulièrement dans le cas en question si l’on en croit les propos de cette même Clémentine Autain («Le signalement est d’une gravité que nous n’avons jamais rencontrée. On est bouleversés par ce qu’on a lu et entendu…») Aucune organisation politique ne peut prétendre soustraire ses militants à la justice. Militantes féministes connues, Clémentine Autain, Caroline De Haas ou Sandrine Rousseau, auraient dû tenter de convaincre les victimes de déposer plainte, et les accompagner dans leur démarche, au lieu d’approuver un choix du silence visant à protéger leur organisation politique des attaques.

Oui, définitivement oui, on peut, sinon se cacher, du moins se protéger derrière la justice, n’en déplaise à Monsieur Ruffin. Qui peut vouloir d’un monde dans lequel le “signalement” (version moderne de la délation) tient lieu de condamnation, où chaque organisation politique fait sa propre justice, où les décisions des juges valent moins qu’une mise en accusation anonyme, où la présomption d’innocence peut être piétinée à l’envi sur tous les plateaux télé?

Déni de jugement

Il était presque touchant Stanislas Guerini, délégué général de la République en Marche, dans sa défense de Jérôme Peyrat, l’un des candidats aux législatives investi par son parti: «C’est un honnête homme, je ne crois pas qu’il soit capable de violences sur les femmes… Il se soumettra au jugement des électeurs.» Le problème Monsieur Guerini, c’est que l’honnête homme en question a déjà été condamné par la justice pour violences conjugales. Certes, il a expliqué au procès qu’elle l’avait vraiment cherché, qu’elle avait jeté ses lunettes par la fenêtre de la voiture; certes les juges ne l’ont condamné qu’à une amende avec sursis; certes elle a aussi été condamnée pour avoir harcelé son ex-compagnon; certes ce n’était que… une grosse gifle (qui a quand même justifié 14 jours d’ITT)… Mais une violence conjugale est une violence conjugale! Et un jugement, un jugement! La question n’est pas de savoir si “l’honnête homme” est capable ou pas de violences sur les femmes. Il est tout simplement coupable de ce délit. Et n’aurait donc jamais dû être investi par le parti politique d’un président de la République qui a fait de la lutte contre les violences faites aux femmes une “grande cause” nationale.

Comment continuer à s’indigner des comportements quasi-sectaires de la France Insoumise qui considère qu’une procédure disciplinaire interne est plus pertinente qu’une plainte en justice s’agissant de violences sexuelles perpétrées par l’un de ses candidats, et qui tente de dissimuler les faits derrière une supposée “campagne raciste d’extrême-droite”, et se permettre dans le même temps d’en appeler au «jugement des électeurs» concernant des faits déjà jugés et condamnés par la justice? Non Monsieur Guerini, ce ne sont pas les électeurs qui jugent de la culpabilité des justiciables, fussent-ils députés. Le suffrage universel ne vaut aucune absolution! En revanche, le responsable d’un parti de gouvernement qui prétend nier un jugement de justice au prétexte que le justiciable, en son âme et conscience, lui parait «un honnête homme», ne mérite pas d’exercer les responsabilités qui lui ont été confiées.

PS: Finalement, Stanislas Guerini et Jérôme Peyrat se sont mis d’accord pour que celui-ci retire sa candidature. Le responsable de LaRem a précisé: «Je ne remets en aucun cas en cause une décision de justice qui mène un travail indépendant. Pour ne laisser aucune place à l’ambiguïté sur nos engagements, j’ai échangé avec Jérôme Peyrat ce jour et nous avons convenu ensemble qu’il retire sa candidature».