A l’approche des élections municipales, la “question rom” revient au centre de la vie politique. Une “question” qui concerne moins de 20000 personnes en France, mais focalise l’attention de la classe politique droite comme socialistes, unis pour dénoncer le péril. Ce n’est pas vraiment bon signe pour la santé démocratique de notre pays. Cela nous a d’ailleurs déjà valu dans la journée de mercredi un rappel aux principes de la part de la commission européenne. Et d’abord à un principe simple: nous, européens, avons tous décidé en ratifiant les traités, que les citoyens européens avaient le droit de circuler et s’installer où bon leur semble dans l’Union. Roumains ou Bulgares ont d’ores et déjà ce droit de circuler librement même lorsqu’ils sont roms, même lorsque, comme l’a pointé lourdement le ministre de l’intérieur Manuel Valls, ils n’ont pas vraiment le même mode de vie que les Français. Manuel Valls craint l’échéance du 1er janvier prochain à partir de laquelle les ressortissants de ces deux pays, qui étaient jusqu’ici l’objet de restrictions, auront les mêmes droits que tous les autres européens, et pourront s’installer et travailler dans tous les pays de l’Union. Il voudrait une application progressive, qui dans un premier temps, laisse passer les hommes d’affaires qui ont du business à faire chez nous, tout en bloquant les plus pauvres qui viennent encombrer nos régimes sociaux. Mais Manuel Valls est tout simplement en retard d’une Europe, d’un Monde. Ceux qui rêvent d’une libre circulation des marchandises, et trébuchent sur la libre circulation des hommes, appartiennent au passé. Ils iront de combats d’arrière-garde en déceptions cuisantes. Car la mondialisation des échanges économiques accélére le mélange des hommes, des cultures, des religions. Il n’est plus temps de dresser des lignes Maginot aux frontières, pour protéger notre mode de vie national, si tant est qu’il en existe un. Les jeunesses de nos pays sont déjà cosmopolites, multiculturelles, de Paris à Bucarest, de Londres à Berlin. Rien n’arrêtera plus ce mélange. Ni les déclarations étriquées du ministre de l’intérieur, piquées au catalogue des lieux communs de la droite, ni les Unes xénophobes de Valeurs Actuelles. La seule question qui vaille, qui a déjà été prise en charge au niveau européen, et c’est à l’honneur de l’Union, c’est: comment faciliter l’intégration de tous les européens dans les communautés nationales, dans des conditions décentes? Et Bruxelles rappelle au gouvernement de gauche que des fonds sont mis à disposition des Etats pour celà, mais que la France est en panne de projets d’intégration des roms. Bref, que nous ne jouons pas ce jeu de l’intégration. En réponse, les responsables politiques socialistes tirent à boulets rouges sur les commissaires européens, comme le faisaient il y a quelques mois, pour les mêmes raisons, les responsables de l’UMP au pouvoir. Du coup, le malaise est le même qu’au lendemain du discours de Nicolas Sarkozy à Grenoble en juillet 2010, stigmatisant les roms, ou devant l’appel à la révolte des élus lancé par Christian Estrosi. Le consensus national construit autour de l’exclusion des plus faibles, jugés trop différents, au nom de la défense jalouse d’une supposée identité nationale, qui pourtant se conjugue au pluriel depuis belle lurette, on n’en veut pas. On n’en veut plus jamais!