Donner le cap !

Dans le brouillard ! C’est sans doute ce que payent aujourd’hui le Président et son gouvernement dans les sondages de popularité. Les Français ont le sentiment d’avancer dans le brouillard. Et la victoire des bleus n’est qu’une lueur éphémère dans la purée de pois. Et lorsque Jean-Marc Ayraud annonce avec fierté qu’on va « remettre la fiscalité à plat », même s’il a raison de s’imposer cette urgence, incontournable, il n’éclaire pas pour autant le chemin. Il est comme le capitaine, disons le vice-capitaine, d’un navire en déroute perdu dans le brouillard, qui indique à l’équipage, qu’on reprend la navigation, mais est incapable d’indiquer le cap. Une « remise à plat », ce n’est pas un cap ! C’est au mieux une exigence intellectuelle critique, peut-être une nouvelle ambition. En tout cas pas une réponse à la question récurrente et lancinante que les Français, toutes catégories confondues, expriment depuis plusieurs semaines de façon plus ou moins brutale : « on va où ? ».

Quand tout devient permis

Faute d’obtenir une réponse, chacun en perd sa boussole. On voit des salariés manifester sous la houlette de leurs patrons, un bonnet rouge vissé sur le crâne. Des socialistes défendre les égoïsmes régionaux, contre l’intérêt commun. Un leader du Front de Gauche tenter de récupérer la grogne anti-impôts. Des céréaliers bloquer Paris pour protester contre la réorientation d’une partie des subventions européennes qui ont fait leurs vaches grasses… vers les éleveurs en difficulté. Des artisans protester contre la hausse de TVA que réclame à cor et à cri le patronat des PME, pour faire baisser ses propres charges. Des routiers faire des opérations escargot, pour obtenir la suppression d’un projet de taxe que le gouvernement a déjà remisé au placard. Et l’inventaire ne s’arrêtera certainement pas là. Quand on est dans le brouillard, chacun perd ses repères. Tout devient permis, en l’absence de perception d’un projet collectif. Tous les égoïsmes sont légitimes, la parole se libère, les barrières morales se fissurent, au point de voir resurgir le pire. On ose affirmer haut et fort tout le mal qu’on pense de telle ou telle communauté, voire ethnie, on ose diffuser sur internet des propos ou images racistes. Collés au ras de ce qu’ils jugent être le « réel », des médias justifient la fraude fiscale au nom du « trop d’impôts », ou encouragent les plus entreprenants à quitter la France, quand ils n’alimentent pas de pseudo-enquêtes journalistiques la xénophobie montante dont ils prétendent rendre compte.

Eviter la mutinerie

Si l’on suppose que nos gouvernants savent ce qu’ils font, et ont une véritable stratégie, il faudra qu’il prennent le temps de répondre à la question, de façon convaincante : on va où ? En votant pour lui, les Français n’ont pas donné un chèque en blanc à Hollande, ils n’ont pas choisi un souverain, libre de les mener où il le juge utile. Ils lui ont donné un mandat, la responsabilité de les conduire quelque part où la vie serait un peu meilleure. La navigation à vue, au hasard des vents, est certes parfois inévitable, quand tout va mal. Mais si l’on veut éviter la mutinerie en pleine tempête, il faut fournir un cap à l’équipage.

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