Neuf Français sur dix sont favorables à une loi sur l’euthanasie. Ils sont même 98% parmi les plus de 65 ans. Quelle loi? Le sondage de BVA reste flou sur ce point. Il est plus précis sur la question suivante: qui doit décider de l’euthanasie? Réponse plus partagée: 53% estiment que c’est à la famille de décider, 41% au médecin et 5% au juge… Et si la famille n’arrive pas à s’entendre? Une loi rédigée selon le voeu majoritaire des sondés n’aurait pas empêché le drame entourant Vincent Lambert.
A vrai dire, aucune loi ne réglera la question de la fin de vie de façon totalement satisfaisante. Car la mort d’un homme ou d’une femme est forcément, toujours, un cas particulier, aussi particulier que l’individu concerné. Or la loi ne sait traiter que des cas généraux. Gageons que le prochain projet de loi, s’il y en a un, se révèlera aussi imparfait que la loi Leonetti actuellement en vigueur.
Quelle est la réalité des pratiques concernant la fin de vie? Elle ne se résume certainement pas aux quelques affaires médiatiques qui éclaboussent la Une de nos journaux. La réalité c’est celle des services de soins palliatifs, des centres anti-cancéreux, des chambres d’hôpitaux où vie et mort se jouent dans une relation intime entre un médecin, un patient, et sa famille lorsqu’il y en a une. C’est une pompe à morphine dont on ouvre le robinet plus ou moins grand, c’est une intervention chirurgicale qu’on décide de ne pas faire. Celui qui a entendu une fois un médecin lui dire à propos d’un proche “s’il souffre trop n’hésitez pas à ouvrir plus le robinet…” sait qu’à cet instant on se fout du code pénal comme de sa première chemise. Quand s’installe entre soignants et proches un dialogue sur l’utilité des soins, sur la nécessité de faire durer les souffrances… on est dans un territoire où la loi et le droit n’ont plus leur place. Il ne reste que la conscience, l’émotion, la dignité, la souffrance et la compassion… Aucune loi ne pourra jamais les codifier. Aucune loi ne pourra jamais décider à la place d’un médecin que la souffrance surpasse l’espérance de rémission, aucune loi ne pourra jamais fixer les conditions dans lesquelles un père, un mère, un fils, une épouse, peut décider de mettre fin à une vie.
Il existe une possibilité pour chacun de dire, ou d’écrire, qu’il ne souhaite pas, le concernant, d’acharnement thérapeutique. Ce n’est pas au législateur de décider ou commence l’acharnement thérapeutique, mais aux soignants. Il appartient aux juges de déterminer, lorsqu’il y a une contestation, s’il y a eu abus ou pas. Le cour d’assises de Pau l’a fait de façon particulièrement humaine et responsable. Restons en là. Et acceptons qu’il existe un espace de “non-droit” juste à la frontière entre la vie et la mort.
Tout à fait d’accord avec votre description-analyse réfléchie et humaniste de ce moment si particulier qu’est la fin de vie. Une question du coup qui me taraude : pourquoi diable le parquet a-t-il fait appel concernant l’acquittement du docteur Bonnemaison ??
Comme vous, je trouve cet appel incompréhensible.