Finalement Trump n’a pas que des défauts. Il est en train de nous prouver que le populisme n’est pas forcément soluble dans la démocratie, et que celle-ci sait se défendre lorsqu’elle est menacée. Depuis quelques jours, son décret sur la fermeture des frontières aux ressortissants de certains pays musulmans, au nom du terrorisme, a déclenché des réactions dans le monde entier et sonné le réveil de tous ceux qui étaient KO debout depuis l’élection du magnat de l’immobilier.
Aux Etats-Unis d’abord, où Obama est sorti de sa réserve pour soutenir ceux qui s’opposent au décret discriminatoire. Et ils sont nombreux. Des célébrités du show-bizz et de la politique, comme ces anonymes, qui ont fait le siège de l’aéroport JFK pour obtenir la libération des migrants qui y étaient coincés alors qu’ils disposaient d’un visa en règle pour rentrer aux Etats-Unis. Grâce à l’intervention d’un juge new-yorkais, les manifestants ont obtenu gain de cause et ont pu accueillir les migrants à bras ouverts. La Californie menace de faire sécession, le gouverneur de l’état de New-York, veut sécuriser le droit à l’avortement, menacé par Trump, en l’inscrivant dans la constitution de son Etat, tandis que le procureur de cette ville appelle les migrants placés en rétention à faire appel à ses services… Bref c’est une véritable rébellion anti-trump qui secoue les Etats-Unis.
A l’étranger, la réaction la plus remarquable a été celle du premier ministre canadien Justin Trudeau qui a invité les réfugiés à venir dans son pays. En Angleterre, celle de Theresa May a été plus tardive et timorée. Il faut dire que Trump a désigné la Grande-Bretagne comme principal allié des Etats-Unis et promis de l’aider à tirer le profit maximum de son Brexit. On se prépare d’ailleurs outre-Manche à accueillir Donald Trump cette année en grande pompe. Mais la visite est déjà contestée, puisqu’une pétition demandant son annulation a obtenu plus d’un million et demi de signatures et imposera donc un débat au Parlement. Même la famille royale ne semble pas très motivée pour recevoir le président américain. Comme d’habitude, dans la foulée de Merkel et Hollande, l’Union européenne a réagi avec toute la “mesure” qu’on lui connait: “La commission européenne s’assurera qu’aucun de ses ressortissants ne subisse de discrimination”... merci pour les autres.
Tout cela n’arrêtera sans doute pas la frénésie populiste du président américain. Il est plutôt adepte du coup de force et de la fuite en avant. D’ailleurs, il n’a pas tardé à limoger pour “trahison” la ministre de la justice intérimaire qui était chargée d’assurer la transition, et qui refusait de faire appliquer sa directive sur l’immigration. Trump est convaincu d’être l’Amérique, et il sera bien difficile de l’arrêter. Même les élus républicains, dont certains ne cachent plus leur désarroi, ont du mal à se faire entendre.
En fait le seau d’eau froide bénéfique pourrait venir des milieux d’affaires. Les patrons de Facebook, Apple, Twitter ou Microsoft ont dit leur désaccord. Pour des raisons de principes, mais aussi parce qu’une bonne partie des dirigeants de la Silicon Valley sont issus de l’immigration, à l’instar de Satya Nadella, le patron de Microsoft, d’origine indienne. On rappelle d’ailleurs à San Francisco que le gourou Steve Jobs était lui-même fils d’immigrés syriens qui n’auraient jamais pu entrer dans l’Amérique de Trump. Et l’on a même vu samedi au milieu des manifestants anti-Trump à l’aéroport de San Francisco, le co-fondateur de Google, Sergey Brin, treizième fortune des Etats-Unis, dont la famille a immigré aux USA pour fuir l’antisémitisme en Russie. Le PDG de Starbucks, qui estime que “le rêve américain est remis en cause”, s’engage quant à lui à embaucher 10000 réfugiés dans le monde ces cinq prochaines années… Celui d’Airbnb saute aussi sur l’occasion pour faire sa pub et promettre aux personnes bloquées à l’étranger du fait de la nouvelle réglementation un hébergement gratuit. Bref, les collègues milliardaires de Trump le rappellent au réalisme: se mettre à dos la moitié de la planète n’est pas bon pour le business. Même Wall Street, dont le Dow-Jones avait fêté l’arrivée de Trump par un record absolu, clôturait hier à la baisse, craignant, d’après les analystes, les conséquences négatives des mesures anti-immigration sur la santé économique des entreprises américaines.
En une semaine Donald Trump aura donc eu le temps de mettre le feu dans son pays mais aura aussi “découvert” au moins une chose: la grandeur de “son” Amérique… doit beaucoup aux immigrés.
Première réaction positive de l’élection de Trump : Facebook et Google sont prêts à participer activement à la chasse aux Fake News dont le rôle dans cette élection est maintenant accepté par tous !