Le temps des reniements ?

Tout le monde à part lui en convient: Le candidature Fillon a du plomb dans l’aile. Sauf soulèvement populaire en sa faveur, il devrait être débranché dans la semaine qui vient, et probablement au profit d’Alain Juppé. Au nom de la nécessaire exemplarité des hommes politiques, la droite échangerait donc un candidat soupçonné d’emplois fictifs contre un autre, condamné lui-même pour emploi fictif il y a quelques années. Une confirmation de l’adage proposé par Alain Juppé lors de la campagne des primaires: “Il vaut mieux avoir un passé judiciaire qu’un avenir…” Belle anticipation de sa part!

On ne peut pas dire pour autant que Juppé fut aussi perspicace dans toutes ses interventions de campagne. Lorsqu’il dit et réaffirma par exemple que pour lui “non c’est non” il ne serait pas le plan B… Il n’y a que les idiots qui ne changent jamais d’avis. Mais du coup, on se demande qui va finalement se renier dans cette affaire. Alain Juppé défendait un programme qui fut rejeté sévèrement par les électeurs de la primaire de la droite. Au contraire, le programme de Fillon pour lequel il n’avait pas de mots assez durs a été plébiscité. Le plan B consistera-t-il en un changement de candidat pour un maintien du programme, au prix d’un reniement du nouveau candidat, ou à un ré-alignement de la droite sur un programme rejeté par ses militants, ou à l’adoption d’un pot-pourri de mesures voulues par les uns et les autres, pour que chacun se sente à l’aise dans ses baskets, et soutienne sans états d’âme le “nouveau” candidat de la droite.

Verra-t-on, comme on le laisse entendre, un tandem Juppé-Baroin se présenter aux électeurs, sachant qu’ils représentent deux extrémités de l’arc programmatique des Républicains, et qu’en plus leur inimitié mutuelle est connue? Ce serait, si l’on comprend bien une façon d’amadouer Nicolas Sarkozy qui ne souhaite pas jusqu’ici ouvrir une voie royale à Alain Juppé et permettrait donc à tous “Les Républicains” de marcher d’un même pas. Tout cela fait un peu tambouille à l’ancienne, on doit bien le reconnaître.

Mais ce n’est rien à côté de la situation dans laquelle vont se retrouver tous ceux qui ont déjà franchi le rubicon pour rejoindre Emmanuel Macron sans attendre le dénouement du psychodrame Fillon. On pense d’abord évidemment à François Bayrou, qui risque de se souvenir qu’avant de faire alliance avec “En Marche”, il marchait aux côtés de Juppé, à qui il doit sa mairie de Pau! Lui qui s’est fait traiter de girouette pour avoir rallié Macron, il peut difficilement refaire un demi-tour pour revenir à ses premières amours, genre “excusez-moi mais la situation n’est plus la même et j’ai une dette à régler du côté de Bordeaux”? D’autant qu’il a obtenu de Macron un projet de moralisation de la vie publique, qui prévoit d’écarter des responsabilités les gens ayant été condamnés par la justice. Pour l’instant Bayrou reste droit dans ses bottes au côtés de Macron.

Et il n’est pas le seul dans l’embarras. Tous les hommes politiques issus de la droite et du centre qui ont rejoint Macron en y voyant une opportunité pour changer la politique vont-ils se renier à leur tour, et revenir au bercail? Et les hommes d’influence qui se croient faiseurs de rois. Alain Minc par exemple… Qui lui aussi est passé de Juppé à Macron? Du coup, ce dernier pourrait se retrouver finalement entouré de soutiens… ni de droite ni de droite, ce qui dé-crédibiliserait sa candidature… Les seuls à s’en sortir sans trop de dégâts seraient alors les centristes de l’UDI, qui forts de leur hardiesse légendaire, ont simplement choisi d’attendre le dernier moment, pour choisir in extremis de laisser tomber Fillon… sans risque, ou presque !

Evidemment tout cela fait encore un peu tambouille, et pourrait renforcer un peu plus le camp du refus, celui du populisme. L’unité de la droite n’y résisterait qu’au prix d’une habile distribution des prix de la part du candidat minoritaire dans son camp, permettant de contenter toutes les tendances du parti. Juppé aurait de bonnes chances d’emporter l’élection nous disent les sondeurs. Et de pouvoir, comme il l’a promis au début de sa campagne pour la primaire… “poursuivre l’œuvre de Jacques Chirac”! Cela ne nous rajeunit pas non plus. Pour la rénovation de la vie politique, il faudrait alors repasser dans 5 ans.

 

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